C'était mieux avant : l'illusion du paradis perdu.

Autour du changement

11/04/2018

S'il est une illusion durable qui ressurgit à chaque crise, c'est bien celle d'un paradis perdu. Nous la portons comme un recours à notre impuissance. Elle est,même chez les non-croyants, une nostalgie biblique du temps d'avant. C'est le temps imaginaire d'avant la chute où nul changement ne s'opère puisque tout y est parfait. C'est toujours le temps d'avant le temps présent. Le présent, cette conjugaison insupportable de la conscience et de la présence à soi. Dans ce paradis idéalisé, l'homme vit avec une Nature bienveillante, forme de Mère universelle, protectrice, prévenant ses moindres désirs, le préservant de tous les dangers, y compris de celui d'être conscient et agissant.

Ce que l'on appelle la chute correspond à l'apparition de la conscience et de la connaissance dans un monde encore indifférencié, celui de la nature sauvage. Eve mange le fruit de l'arbre de la connaissance. Suite à cette transgression, Adam et Eve sont chassés du "paradis" de l'ignorance. Oui, le libre arbitre est une transgression contre l'immobilité de l'ignorance. Eve et celles qui suivront accoucheront dans la douleur: chaque prise de conscience sera créatrice de sens et douloureuse. Car le chemin vers la conscience et la responsabilité est difficile. Comme la course du soleil, il a ses zéniths et ses déclins. Mais il suffit qu'un homme le foule pour que le monde existe dans sa dimension verticale.


La nature comme la vie ne sont ni bonnes ni mauvaises. La terre nous nourrit mais elle est aussi un lieu de dangers pour l'homme, même si ce dernier reste son plus grand prédateur. La progression de la vie depuis son apparition ne ressemble en rien à l'image d'un paradis: elle s'est faite au prix de la compétition et de la coopération entre les espèces, au prix aussi de nombreux cataclysmes. Les premiers hommes ont traduit ce lien écrasant avec les forces de la nature dans un panthéon de dieux impitoyables et irascibles, d'où ont surgi quelques divinités bienfaitrices, premiers symboles de la conscience balbutiante.
La nostalgie d'un paradis perdu est toujours un désir de régression vers un état d'inconscience. Ce ne sont pas les progrès liés à la connaissance qui nous mettent en danger, mais l'absence d'une connaissance accompagnée de sens.

 

Texte Le vent du changement - Crédit photos Pixabay

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